29 enero, 2013

Le destin pour ceux qui y croient est sans doute le fruit et résultat de pénibles travaux et de grands sacrifices. C’est loin d’être un coup de chance comme beaucoup le prétendent, en fait c’est nous qui en sommes réellement le fervent artisan. Nous autres haïtiens, nous concevons l’école comme le fondement même de notre vie, mais un fondement qui s’affermit sur les bases d’énormes sacrifices. Malgré que les autorités n’aient aucun souci de primer l’éducation, nous y croyons fermement. Nombre d’entre ceux qui ont précédé ma génération sont allés à l’école à l’âge de 10 ans pour certains, mais pour d’autres 12 et 15 ans. Le kindergarden n’existait pas encore, on devrait directement entrer en classe fondamentale, mais une partie plus aisée avait eu la chance d’entrer dans une section qu’on appelait à cette époque « enfantine », sans doute, elle aurait équivalu au kindergarden d’aujourd’hui. Normalement, l’école la plus proche d’une communauté devait se situer à au moins une dizaine de kilomètres environ des habitats de ses écoliers. Ce qui fait que ces petits héros devaient se lever de très tôt les matins pour aller chercher de l’eau à environ 6 kilomètres de la maison dans des sources, prendre soin des animaux (dans le langage paysan, les changer) et ensuite revenir à la maison pour se préparer à aller à l’école. Après tous ces travaux effectués, les familles n’ont pratiquement rien donné à manger aux enfants, comment peuvent-ils être réceptif au message de l’instituteur ou l’institutrice ? Ce qui est surprenant, c’est qu’ils sont toujours brillants à l’école, beaucoup plus que ceux qui sont issus des familles aisées. C’est pour cela que je me rejoins à l’affirmation d’Alfred De Musset « Nul ne se connait tant qu’il n’a pas souffert », par le fait qu’ils soient venus de loin, ils ont marqué la différence en travaillant durement afin de transcender leur vie. Tout compte fait, nous avons compris et nous sommes conscients des difficultés auxquelles font face les parents de ces enfants, car ils sont des paysans qui attendent la récolte afin de pouvoir nourrir leurs enfants. La récolte couvre pour la plupart une saison, ce qui fait que si une famille n’avait pas réservé quelques greniers, elle risque de passer toute une péripétie lors de la période de sécheresse. Qui pis est, les écoliers après s’être revenus de l’école ne trouvent encore rien à manger, ils prennent malgré tout, leurs livres et leurs cahiers rédiger leurs devoirs et étudier leurs leçons. Souventefois, ils savent aller dormir sans rien prendre et leurs parents leur donnent de l’eau salée en vue de pallier à la faim qui leur tenaillent et leur tiraillent. Le lendemain matin, la même routine se perpétue tel le travail d’une machine programmée. Le plus étonnant c’est que ces petits écoliers réussissent avec brio tous leurs examens or nous savons que l’une des caractéristiques fondamentales de la performance d’un écolier dépend de son alimentation, sa nutrition etc. par contre malgré la sous-alimentation, les petits haïtiens s’en sortent fort bien. Marcher des kilomètres sans rien manger le plus souvent pour recevoir le pain de l’instruction est le sort de nos petits écoliers depuis plus d’une décennie. Haïti est l’un des rares pays de l’hémisphère américain à avoir des jeunes à être aussi accro à l’éducation malgré son sous-développement. Ils ne peuvent être bien nourris, ils ne peuvent pas se divertir, ils ne trouvent pas assez de matériels et d’outils éducatifs, mais ils font de l’’école leur vie et leur passe-temps. Si nous avions un système éducatif solide et structuré comme les autres pays de l’hémisphère, rien ne pourrait nous retenir. Malgré que notre système soit faible, nos petits écoliers, nos étudiants une fois laissés le pays brillent comme le soleil là où ils arrivent après avoir maitrisé la langue des territoires où ils étudient. L’école c’est réellement notre vie, mais une vie qui subsiste en raison d’énormes sacrifices, ce qui fait que nos écoliers et nos étudiants sont des héros. Apprendre et exceller dans la misère et la faim n’est pas aisée pour les faibles mais pour les forts. Ceux qui disent que nous sommes nuls et faibles doivent dorénavant savoir que notre faiblesse fait notre force.

0 commentaires :

Publicar un comentario